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Les prestataires de services étrangers intervenant en France ont tendance à croire que les certificats de détachement A1 délivrés à leurs salariés seraient un rempart infranchissable contre les sanctions financières et pénales pour travail dissimulé. Or, la réponse de la loi française est plus nuancée.

  • Rôle du certificat A1

Les règlements européens posent les principes de la coordination des systèmes de sécurité sociale dont le but est de soumettre les travailleurs qui se déplacent à l’intérieur de l’Union européenne au régime de la sécurité sociale dun seul État membre, pour éviter les cumuls de législations nationales applicables et les complications en résultant.

Selon l’article 11 § 3 du règlement n° 883/2004 du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, la règle générale est celle de lapplication de la législation de lÉtat dexercice de lactivité salariée.

Ainsi, un employeur établi dans un Etat de l’Union Européenne et ses salariés détachés sur le territoire français restent soumis à la législation de la sécurité sociale de leur pays d’origine.

La régularité de la situation de l’entreprise étrangère et de ses salariés est attestée par un certificat A1 émis par l’organisme de la sécurité sociale de son pays d’origine.

Dans le cadre des opérations de contrôle de la part des autorités françaises, l’entreprise étrangère doit être en mesure de produire les certificats A1 pour chacun des salariés détachés.

Au titre de son obligation de vigilance, le donneur d’ordre français doit se faire remettre de la part de son cocontractant européen, entre autres documents avant le début du détachement, puis tous les 6 mois, les certificats A1 des salariés détachés par ce dernier.

  • Force juridique particulière du certificat A1

Le certificat A1 bénéficie d’une valeur juridique particulièrement forte. Il est affirmé par la Cour de Justice de l’Union Européenne qu’aussi longtemps que le certificat A 1 n’est pas retiré ou déclaré invalide par les autorités qui l’ont établi, il s’impose dans l’ordre juridique interne de l’État membre dans lequel le travailleur salarié est détaché (CJUE, 27 avril 2017, aff. A-ROSA Flussschiff, C-620/15).

Par arrêt du 2 mars 2023, la Cour de Justice de l’Union Européenne a rappelé que le certificat A1, même temporairement suspendu ne perd pas ses effets contraignants et il continue à lier les juridictions. Les démarches qu’un Etat membre doit suivre en cas de doute sur la validité de tels documents et pièces justificatives, sont rappelées par la Cour (CJUE, 2 mars 2023, aff. C-410/21 ).

Toutefois, à la demande des autorités françaises, l’organisme de sécurité sociale dont dépend les salariés détachés, peut déclarer leurs certificats A1 invalides.

  • Possibilité de remise en cause du certificat A1

Il existe, en cas de litige sur la validité du certificat A1, des procédures de dialogue entre les Etats qui ont été mises en place pour permettre, le cas échéant, le retrait des certificats A1.

La Cour de cassation a retenu que le juge, saisi de poursuites pénales du chef de travail dissimulé, pour défaut de déclarations aux organismes de protection sociale, ne peut écarter lesdits certificats que si, sur la base de l’examen des éléments concrets recueillis au cours de l’enquête judiciaire ayant permis de constater que ces certificats avaient été obtenus ou invoqués frauduleusement et que l’institution émettrice saisie s’était abstenue de les prendre en compte, dans un délai raisonnable (Crim., 18 septembre 2018, pourvoi n° 13-88.631, Bull. crim. 2018, n° 160, et Crim., 2 mars 2021, 19-80.991, Publié au bulletin)

Du fait du retrait des certificats A1 par l’autorité émettrice, ou à défaut de réponse de da part dans un délai raisonnable, l’employeur étranger sera condamné à payer les cotisations sociales dans le pays d’accueil.

Quant au donneur d’ordre français, il pourra être condamné à garantir le paiement de l’indemnité pour travail dissimulé, au titre de sa responsabilité solidaire, si, bien qu’averti de la présence de salariés en situation de travail dissimulé, il n’a pas enjoint aussitôt à leur employeur de faire cesser sans délai cette situation (Cass. Soc., 4 nov. 2020, n°18-24.451).